Les Suisses n’ont jamais autant déménagé
L’augmentation du choix d’appartements et la baisse des loyers incitent de plus en plus à changer de logement. Mais les cartons ne sont souvent déplacés que de quelques kilomètres
Les Suisses ont reçu le message. La donne a changé sur le marché immobilier et après presque quinze ans de hausse ininterrompue, la courbe s’est inversée. Depuis plusieurs mois, les loyers baissent.
Les locataires comptent bien en profiter. Ainsi, ce retournement de tendance sur le marché provoque une vague de déménagements encore jamais observée dans le pays. En une année, près d’un locataire sur quatre (22% précisément) a changé de logement, selon une étude publiée mardi par Comparis.ch.
«Une nouvelle dimension»
Ce sondage, réalisé auprès d’un millier de locataires, ne fait que confirmer des précédentes enquêtes sur le sujet. Dans un document publié en juin dernier, Wuest Partner parle même d’une «nouvelle dimension», en constatant qu’en Suisse, plus d’un million de personnes ont changé de logement sur la seule année 2015. Autrement dit, une personne sur huit a décidé de faire le pas. Selon les données analysées par le bureau de conseil immobilier, ces 12% de résidents suisses ont emménagé dans 490’000 appartements ou maisons, à la location ou à la vente.
Les raisons de cette vague sont identifiées: le boom immobilier de ces dernières années, soutenu par les taux bas et la volonté des investisseurs de miser sur la pierre, a fait émerger une offre non seulement plus étendue, mais aussi plus qualitative, avec l’arrivée sur le marché de logements neufs et rénovés. Actuellement, près de 65 000 biens d’habitation sont vacants dans le pays. Là aussi, c’est un record.
Autre raison de cette accélération: l’amélioration du réseau de transports publics, qui a permis à certaines communes mal desservies par le passé d’entrer dans le radar de davantage de ménages. Enfin, toujours en raison de l’augmentation de l’offre, les loyers se replient depuis 2015. Le recul atteint 2,2% en moyenne suisse. Dans la région lémanique, par exemple, ils ont baissé de 2,5%, entre 2016 et 2017.
Les enfants d’abord
Si leur fréquence augmente, les raisons fondamentales d’un déménagement restent les mêmes, souligne Wuest Partner. Les Suisses changent surtout de logement lorsqu’ils terminent leurs études, se mettent en ménage avec leur partenaire puis pour fonder une famille. Mais lorsque les enfants entrent à l’école obligatoire, le taux d’immobilisme augmente nettement. Ainsi, dans la tranche d’âge de 30 à 54 ans, la propension à faire ses cartons est deux fois moins élevée que pour les 15-29 ans.
Début novembre, une étude du canton de Vaud s’est, elle aussi, intéressée à la mobilité des familles. Elle démontre le poids de la composition des ménages dans les décisions de déménagement. Il en ressort par exemple que les couples sans enfant et ceux ayant un seul enfant de moins de 10 ans affichent la même prédisposition à changer de logement. Entre 2013 et 2016, ils ont été environ 15% à faire le pas chaque année.
Dans un rayon de 1 kilomètre
Mais cette proportion passe à 20%, pour ceux qui ont, eux, un premier enfant durant l’année précédente. En revanche, lorsqu’une deuxième naissance intervient, les familles deviennent moins nomades. Seules 9% de celles qui comptent deux enfants changent de domicile. Ce sont aussi elles qui sont les plus réticentes à quitter leur commune. Parce qu’elles ne veulent pas «abandonner leur réseau de connaissances et d’entraide, qui contribue souvent à l’organisation du quotidien», explique l’étude publiée par le Service vaudois d’informations statistiques.
L’étude de Wuest Partner ne dit pas autre chose: un déménagement sur trois a lieu dans un rayon de 1 kilomètre. Dans deux tiers des cas, le nouveau lieu de vie se trouve à une distance maximale de 5 kilomètres. En bref, les Suisses changent volontiers de toit, mais ils ne veulent pas changer de vie.
Source : Le Temps